#IDE6 La force des images : fiction et réalité.
A découvrir aujourd'hui : l'abstraction au musée d'Art Moderne, le surréalisme au musée Montmartre ou la photographie au Centre Pompidou ou la Maison de la culture du Japon à Paris.
C’est quoi la “force des images” ? 🤔
Ce titre ne signifie par grand chose. Comment attribuer quelconque intensité à une image ou une peinture, inerte, fixe et matérielle par définition ? Surtout si on considère que par sa vision subjective et personnelle, le spectateur vient ajouter un filtre supplémentaire à l’image. Cela se fait indépendamment de la volonté de l’artiste à l’origine de l’œuvre, le spectateur y intègre son interprétation automatiquement.
Mais les images ont du sens. Difficile de rester insensible face à certaines représentations, et qu’elles soient peintes ou photographiées, cela ne change rien. L’image a un sens, enrichie par l’observation du regardeur. La sélection d’expo d’aujourd’hui est un bon exemple, qu’importe le matériau, le style ou le sujet représenté, les images nous parlent et marquent l’esprit. En tous cas, cela a été mon cas pour quelques œuvres présentées ici.
Trêve de bavardage, passons au compte rendu !
Sommaire :
#Peinture #Histoiredunmouvement « Surréalisme au féminin ? », musée de Montmartre ;
#Peinture #ArtAbstrait « Anna-Eva Bergman, voyage vers l’intérieur », musée d’Art Moderne de Paris ;
#Photographie « Lynn Cohen / Marina Gadoneix, Laborataires / Observatoires » et « Moï Ver », Centre Pompidou ;
#Photographie #Rétrospective « Ken Domon, maître du réalisme japonais », Maison de la culture du Japon à Paris.
« Surréalisme au féminin ? », Musée de Montmartre, le 8 avril à 16h20
C’est la première fois que je me rends au petit Musée de Montmartre, situé à quelques rues du Sacré-Cœur, abritant un joli jardin ainsi qu’un atelier d’artiste. Son exposition « Surréalisme au féminin ? » présente les créations d’une cinquantaine d’artistes femmes ayant contribué au mouvement surréaliste des années 1920 jusqu’en 1960.
Les espaces du musée sont au cœur d’une maison parisienne typique du 19e siècle, les pièces sont assez petites, les couloirs sinueux. Lors de ma visite, il y avait beaucoup de visiteurs ce qui rendait la déambulation très désagréable. Il n’est pas rare de tomber nez à nez face à une œuvre tant la foule est importante : impossible d’en profiter en étant à quelques centimètres de l’œuvre. Ce projet d’exposition est néanmoins ambitieux, il couvre de multiples thématiques (nature, féminité, chimères, nuit etc.) à travers la pratique de beaucoup d’artistes. Pour refléter la profusion des femmes surréalistes, un mur entier est dédié à les présenter mais la masse d’informations est difficile à prendre en compte. Les textes des salles présentent une sélection d’artistes mais après plus d’une dizaine de salles, l’on a tendance à confondre les œuvres et les artistes. Il aurait peut-être fallu faire une sélection d’un nombre limité d’artistes et de consacrer plus d’espace à chacune d’entre elles pour que le propos impacte durablement le visiteur. La volonté d’être exhaustif dépasse la lisibilité du propos, jusqu’à en devenir presque indigeste.
Dans cette exposition, on peut contempler le surréalisme à travers ses différentes artistes femmes. Cependant, celle-ci donne la définition de ce mouvement au travers les mots d'un homme, André Breton, auteur des Manifestes du surréalisme. Il aurait été pertinent de connaître la vision de ces artistes de ce qu’est le surréalisme, ce qui est assez dommage. Quoi qu’il en soit, il y a des œuvres assez étonnantes et particulièrement innovantes par rapport à l’époque à laquelle elles ont été produites. On retiendra les noms Claude Cahun, Toyen, Dora Maar, Lee Miller mais… On sort de l’exposition avec la tête qui tourne un peu tant les femmes surréalistes furent nombreuses et productives – ce qui est un constat rassurant malgré tout.
L’exposition se termine le 10 septembre.
Tarif plein : 15€ / Tarif réduit : 10€ (étudiant et -25 ans, enseignant, personne situation de handicap)
Musée de Montmartre, 12 Rue Cortot, 75018 Paris.
« Anna-Eva Bergman, voyage vers l’intérieur », Musée d’art Moderne de Paris, le 14 avril à 13h51
Il s’agit d’une rétrospective comme on les aime, dans un environnement calme et reposant, où le tumulte parisien n’est qu’un lointain souvenir : ici pas de pollution sonore ou visuelle. Les œuvres invitent à l’introspection et à l’observation pour cette première rétrospective de l’artiste en France. Quelque 300 œuvres graphiques et picturales (dessins, croquis, peintures figuratives tendant vers l’abstrait) sont exposées dans un parcours chronologique.
Originaire de Norvège, Bergman se tourne en début de carrière vers la figuration proche de l’architecture et de la nature. Progressivement, l’artiste explore des sujets abstraits mais ce glissement vers l’abstraction ne s’opère jamais complètement. Les textes ou cartels fournissent presque toujours un contexte ou sinon une thématique. Des documents d’archives permettent de voir Bergman travaillant dans son atelier, à la recherche de représentations harmonieuses en étudiant par exemple le nombre d’or. Elle va développer un vocabulaire qui lui est propre, proche du symbolisme, de la mythologie ou encore de la cosmologie. L’artiste maîtrise des techniques plastiques variées dont la gravure sur bois ou l’art de l’estampe, mais elle est essentiellement connue pour son travail de la feuille de métal. Ce matériau lui permet de jouer sur la luminescence de ses œuvres, encourageant le regardeur à adopter plusieurs points d’observation.
J’ai beaucoup aimé cette exposition, les œuvres sélectionnées sont de grande qualité et permettent de comprendre l’approche multiforme de l’artiste par rapport à sa vision du monde. Son travail sur les effets de la texture et de la lumière est fascinant. Je vous recommande de faire cette visite si jamais vous êtes dans le coin !
L’exposition se termine le 16 juillet. Tarif plein : 15€ / Tarif réduit : 13€
Musée d’art moderne de la Ville de Paris, 11 Avenue du Président Wilson 75016 Paris
« Lynne Cohen / Marina Gadonneix, Laboratoires / Observatoires » et « Moï Ver », Centre Pompidou, le 28 avril à 17h48 fin à 18h45
L’exposition « Lynne Cohen / Marina Gadonneix, Laboratoires / Observatoires » présente le travail de ces deux photographes en comparant leurs approches et points de vue photographiques. De trente-trois ans son aînée, Lynne Cohen a eu une influence sur Marina Gadonneix et elles ont tenu une correspondance jusqu’à la mort de la première en 2014. Le parcours est rythmé par des clichés hétérogènes avec d’un côté les showrooms et les observations de Cohen tandis que de l’autre, les salles d’enregistrement et les laboratoires chez Gadonneix. Les images, toutes dénuées de présence humaine, explorent l’étrangeté des espaces vides, les phénomènes physiques étudiés en laboratoire (des simulations de séismes ou d’ouragans par exemple) ou encore des salles d’entraînement de certains métiers (entraînement médicaux, policiers ou pompiers par exemple). Les images traduisent une espèce de flottement, des moments suspendus et presque irréels. Si ces imageries d’espaces désertés ont piqué votre curiosité, l’exposition se termine fin août.
Quelques mètres plus loin, l’expo « Moï Ver » présente également des photographies, mais d’une autre époque. Le parcours suit les voyages du photographe du début du XXe siècle jusqu’aux années 50’s. On y voit plus de 300 clichés : des scènes de vie, des expérimentations et de l’architecture. Moï Ver est proche des mouvements de la Nouvelle Objectivité et du Surréalisme, comme en témoignent son travail (photomontage, angles serrés, contre-vue, etc.). Il s’intéresse essentiellement aux passants qu’il croise dans la rue, révélant les conditions de vie des communautés juives de l’avant-guerre. Une série est dédiée aux « Kibboutzein », des lieux d’apprentissage de la vie agricole destinés à la jeunesse en vue de s’installer en Palestine. Il intégrera la propagande sioniste afin de mettre en valeur l’esthétique paysanne, à travers des clichés du milieu rural et du travail de la terre. Le photographe, muni de son Leica, enregistre les moments sur le vif traduisant son intérêt pour la représentation fidèle de la réalité primant sur l’esthétique. La fin de l’expo présente également quelques œuvres de peinture, de nature plutôt abstraites. Témoin de son temps, Moï Ver a su capter l’essence d’une époque marquée par l’effervescence artistique sous l’ombre de la menace du conflit mondial, bien qu’il ait été épargné par la guerre.
Les deux expositions sont ouvertes jusqu’au 28 août. Tarif plein : 17€ / Tarif réduit : 14€ / Nocturnes les jeudis jusqu’à 23h.
Centre Pompidou, Place Georges-Pompidou, 75004 Paris.
« Ken Domon, maître du réalisme japonais », Maison de la culture du Japon à Paris, le 26 avril à 17h37 fin à 17h53
Pour cette troisième exposition photo de ce post, on voyage au Japon d’entre les années 1930 à 1970. Il s’agit de la troisième rétrospective dédiée à Ken Domon en Europe, qui présente une centaine de clichés au cœur d’une scénographie intimiste.
L’exposition est découpée chronologiquement, avec d’abord les premiers essais balbutiants du photographe dont l’approche et le style vont se confirmer assez rapidement et dont l’exigence grandira. Le travail de Ken Domon est marqué par la Seconde Guerre mondiale et l’inévitable assaut nucléaire qui en découla. On découvre des images de soldats alignés par centaine, le portrait d’une infirmière au regard perçant qui m’a marqué, des enfants vivant dans la misère… L’après-guerre est marqué par l’affirmation d’une recherche de réalisme, Ken Domon documente des scènes de rue en tout genre (vie paysanne, vie urbaine, etc.). Il dédie une série à des enfants, dont les parents sont absents car leur emploi leur a été arraché en raison de la fermeture d’une usine à charbon au profit de l’extraction du pétrole. La grande détresse et la pauvreté de ces enfants est palpable, les images plus fortes que les mots. Une autre série, tout aussi poignante, est dédiée à Hiroshima, qui a fait l’objet d’une publication d’environ 180 images à l’époque. Ken Domon fait le choix inédit de montrer les conditions de vie des survivants de la bombe nucléaire, où les visages mutilés deviennent témoins des ravages de la guerre. Plus loin, deux séries s’écartent de ces thématiques sinistres : l’une est dédiée à des portraits d’amis et des connaissances du photographe ; l’autre à la « route des temples anciens ». Cette dernière rassemble de belles images issues de la fin de carrière de Ken Domon alors victime de plusieurs hémorragies cérébrales, ce qui le poussera à travailler avec des assistants avant d’entrer dans un coma dont il ne se réveillera jamais.
Cette exposition nous rappelle la force intrinsèque des images, qui deviennent les témoins et les véhicules d’une pensée et d’un moment unique de notre passé. Cet accrochage s’inscrit dans une programmation riche proposée par la Maison de la culture du Japon, que je vous invite à consulter ici. C’est grâce à la recommandation de @LivyEtoile sur twitter (coucou si tu me lis !) que je me suis rendue au MCJP et j’y retournerais car la qualité est au rendez-vous !
L’exposition se termine le 13 juillet. Entrée gratuite et sans réservation.
Maison de la culture du Japon à Paris, 101 bis, quai Jacques Chirac 75015 Paris.
C’est tout pour aujourd’hui, profitez bien du weekend prolongé et courage à ceux qui bossent demain ! A bientôt ! 👋🏻
La dernière expo + celle de Bergman me disent bien 👍🏻